Je ne suis plus membre du PCF.

img_1678.jpgUn courrier que j’ai adressé le 19 juin 2007 aux directions fédérales et locale du PCF.

Chers camarades,

En profond désaccord, avec les changements d’orientation sur les élections présidentielles, je m’étais mis en congé de parti tout le temps des présidentielles jusqu’à ce jour. Il est temps pour moi, après y avoir mûrement réfléchi, de clarifier mon rapport au Parti communiste français.

Je vous propose donc de ne plus me considérer dans les effectifs du PCF. Je ne suis plus adhérent. Adhérent depuis 1979, j’ai pris beaucoup de plaisir à militer au PCF, j’ai appris beaucoup de chose. Ce parti m’a formé (de mauvaises langues diront « déformé »). Il a été pour moi un espace de liberté et d’épanouissement. J’y compte de nombreux amis. J’espère conserver ces rapports d’amitié avec de nombreux militants du PCF. Mais pour moi l’adhésion à un parti ne peut se résumer à un rapport affectif, c’est d’abord et avant tout un rapport avec un outil utile pour penser et agir, et dans le cas des communistes un outil pour aider à la transformation du monde.

Pour aller vite sur mes motivations :

– En juin 2002, dans une tribune dans l’Humanité intitulée « Faisons un enfant » j’écrivais : « La Conférence nationale devrait proposer aux communistes de faire un enfant : s’engager dans la création d’une nouvelle force politique dans la filiation du Parti communiste français et ouverte sur d’autres courants de pensée. C’est-à-dire engager le débat sur la décision de travailler sur trois fronts à la fois : un projet de transformation de la société (projet communiste), créer une nouvelle force politique dans la filiation du PCF, une stratégie adaptée a ce projet ».

– En 2003, j’ai démissionné de toutes mes responsabilités dans l’organisation du PCF, et cherché du travail car je diagnostiquais le fait que le PCF ne pouvait pas changer, ne voulais pas s’engager dans la voie de ce qu’il me semble être d’indispensables modifications pour une force qui veut être révolutionnaire au XXIe siècle. Je prenais acte du fait que c’était une décision majoritaire chez les communistes.

– En juin 2006, je commençais à croire que je m’étais trompé sur mon diagnostic avec la proposition faite et adoptée d’engager le PCF sur la construction d’une candidature unitaire anti-libérale à l’élection présidentielle. Je m’investis sans réserve sur les collectifs unitaires. Je reprenais espoir dans la capacité du PCF à se bouger.

– En décembre 2006, douche froide avec la proposition de candidature de Marie-George Buffet, (lettre ouverte à MGB) comme candidature unitaire, alors qu’il était évident que cette proposition de la première secrétaire du PCF ne pouvait pas faire le « double consensus » nécessaire. Janvier 2007, je me mets en congé de parti. Je parraine Bové, mais je ne soutiens aucun candidat aux présidentielles. Je participe à la campagne pour l’élection de Roland Muzeau, pas seulement par amitié, mais surtout parce que je pense qu’il est le seul capable de garder la circonscription bien à gauche et être un point d’appui à l’Assemblée nationale pour tous les anti-capitalistes.

– Juin 2007. La campagne des législatives étant passée, je peux vous faire part de ma décision sans nuire à quiconque. Il s’agit là d’un acte qui me semble cohérent avec le constat que je fais : le PCF, la majorité de ses adhérents souhaitent d’abord prolonger l’existence de la structure existante et ne veulent pas s’engager dans de profondes transformations. Avec regret, j’en prends donc acte.

Qu’est-ce que je vais faire ?
Ma décision de ne plus être adhérent du PCF ne me pousse pas à arrêter de faire de la politique. Je me considère toujours comme communiste. Je souhaite transformer le monde, plus modestement jouer un petit morceau de la partition qui permettra de changer l’ordre existant. Je ne me transforme pas en militant anti PCF. J’agirai tout simplement aux cotés ou avec des militants PCF à chaque fois que je serai d’accord, je donnerai mon point de vu ou agirai de façon autonome à chaque fois que cela sera nécessaire. Un peu comme maintenant mais sans la carte, sans lien organisationnel !

Comme militant, en plus de mon investissement dans plusieurs associations Gennevilloises, je fais parti « des communistes unitaires ». Un espace qui cherche nationalement à rassembler des communistes membres ou non d’une organisation. J’ai aussi le projet de m’investir d’avantage dans un travail avec d’autres, hors enjeux de pouvoir et organisationnels », sur la question de la redéfinition du projet communiste au XXIe siècle.

Comme militant, j’entends passer du temps à construire et développer une association politique sur Gennevilliers : Alternative citoyenne, qui a pour but de travailler ici le champ de la transformation sociale. Je voudrai, sans être sur d’y arriver, favoriser la prise de responsabilités et d’interventions des jeunes de notre ville.

Comme élu. Jusqu’à la fin de mon mandat (2008) je reste au groupe communiste et Républicain de Gennevilliers et au CG. Je continue à reverser mes indemnités au PCF. C’est le contrat de départ, et je n’ai pas de raison de le faire cesser.

Je me doute bien que des camarades s’interrogent légitimement sur l’avenir de mes mandats de conseiller municipal et général. Je ne peux, à l’heure actuelle que vous présenter mon état d’esprit. Le moment venu les communistes auront certainement à se prononcer sur l’arc du rassemblement auquel ils entendent contribuer, les personnes qu’ils souhaiteront soutenir, sur l’enjeu des scrutins. Il est trop tôt pour en débattre, mais il n’est pas trop tôt pour que vous connaissiez mon état d’esprit.

Donc en toute franchise et sans tourner autour du pot, je souhaite renouveler mon mandat de conseiller général pour continuer, en faisant équipe avec Jacques Bourgoin, à agir et défendre l’intérêt des Gennevillois au Conseil général. J’entends le faire aussi pour expérimenter politiquement tout ce qui permet de redonner du pouvoir aux gens. Je veux mettre ce mandat au service de celles et ceux qui veulent faire entendre une opinion différente des idées dominantes, qui veulent développer des paroles et des actes qui vont dans le sens de la transformation sociale. Je le ferai en lien avec Alternative citoyenne Gennevilliers, mais aussi avec toutes celles et tous ceux, de manière collective ou individuelle, qui auront soutenu cette démarche. Cela va certainement me demander d’améliorer et de développer ma capacité de travail et de co-élaboration avec « les soutiens » : être en débat et prise de décisions avec les citoyens et les organisations qui le souhaitent, et pas seulement le temps d’une campagne, mais tout au long de l’exercice du mandat.

Par ailleurs, certains pourraient tout aussi légitiment s’interroger sur mon rapport à la majorité municipale d’autant que je m’engage dans une nouvelle association politique « Alternative citoyenne Gennevilliers ». Pour être très claire, je me sens en adéquation avec l’action municipale impulsée par Jacques Bourgoin. Je crois en l’esprit critique pour avancer. Je crois dans la nécessité de pousser des débats, des actions pour transformer l’ordre existant, y compris localement. Je crois aussi indispensable de faire de la place à la jeunesse et à la diversité de notre ville dans les lieux de pouvoir. Si avec Alternative citoyenne Gennevilliers, je peux y contribuer et bien tant mieux. Si j’échoue et bien ce ne sera pas la première fois ni la dernière que je rate quelque chose. A moi, à d’autres de remettre l’ouvrage sur le métier !

Voilà chers camarades ce que je tenais à vous dire, longuement pour une lettre, trop lapidairement pour pouvoir tout dire. Comme je l’ai dit à Philippe Clochette, je reste à la disposition des camarades de Gennevilliers s’ils souhaitent une rencontre sur ce sujet.

Soyez assurés, Chers camarades, de l’expression de mes sentiments les plus fraternels,

Patrice Leclerc

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