30/03/07 intervention général sur le budget

92.jpgSéance du 30 mars 2007 – Intervention générale sur le budget – Michel Laubier

Monsieur le Président, Cher(e)s Collègues,

Nous sommes entrés depuis longtemps déjà dans une période totalement dominée par la campagne électorale – une campagne qui souligne l’état de crise de notre pays, à entendre tous les candidats… Beaucoup découvrent que la France va mal
Pour notre part, cela fait des années que nous alertons sur les difficultés de plus en plus inextricables rencontrées par les personnes les plus fragiles de notre société. Les inégalités continuent de se creuser, les tentes des Sans Domicile Fixe tardent à quitter les quais des villes, et pendant ce temps-là, les bénéfices des entreprises du CAC 40 atteignent des sommets.
Il y a là quelque chose de totalement inacceptable, que nous ne pouvons pas nous contenter de constater !

Du côté des collectivités locales, la situation n’est pas beaucoup plus brillante : nous assistons à la fois à la réduction de l’autonomie financière des collectivités territoriales, et à la substitution progressive de la contribution des entreprises par le fiscalité locale, c’est-à-dire les habitants.
Toutes les mesures prises ces dernières années pèsent terriblement sur les finances locales : la part de taxe professionnelle qui décline peu à peu dans les budgets, la suppression de la part-salaires, la mise en place du bouclier fiscal qui avantage scandaleusement les grands groupes, tout cela fait se lever des protestations unanimes dans toutes les associations d’élus.
Coût de cette mesure : 65 millions d’euros de cadeau de Taxe Professionnelle transférés de fait sur les autres contribuables !
On constate ainsi, pour la première fois dans notre budget, que les bases de la taxe professionnelle baissent par rapport à l’an passé.
Il faut supprimer très vite ce bouclier fiscal, et repenser une vraie réforme de la taxe Professionnelle, plus juste, prenant en compte les profits réalisés par les entreprises
Enfin autre point négatif directement lié à la politique nationale, ce sont les conséquences financières de la Décentralisation qui restent aujourd’hui encore très floues ; je rappelle, je l’avais déjà dit lors des orientations budgétaires,  qu’il manque environ, au plan national, 1 milliard d’euros pour le financement du RMI, d’après le rapport fait au Sénat pour le compte de l’observatoire de la Décentralisation ! Tout cela alors que le nombre de bénéficiaires du RMI subit de plein fouet la réforme de l’assurance chômage, la diminution de la période indemnisée ayant entraîné un transfert des personnes privées d’emploi, indemnisées par la Solidarité Nationale, vers le RMI financé par les départements..
Le nôtre, pour des raisons politiques, reste très discret sur ce sujet, car il a largement les moyens de faire face. Quel est le coût réel de la décentralisation, voilà une question qui me semble importante à soulever à l’occasion de ce débat budgétaire.
Notre département dispose toujours de ressources importantes. Notre département recevra cette année près de 1,4 milliards d’euros de recettes de fonctionnement ! Et encore, le CG se prive d’inscrire au bas mot 150 à 160 Millions d’euros au titre des recettes des droits de mutation ! Doit-on encore parler d’une prudence excessive, lorsque vous nous annonciez, pour 2006, une recette aux alentours de 440 M€ ? La question se pose, surtout lorsque vous affichez en investissement un emprunt de 243 millions d’euros dont vous n’allez vraisemblablement mobiliser qu’une petite partie…
A ce stade, la question n’est pas de déplorer l’existence de tout cet argent public, mais de nous interroger sur l’usage qui en est fait.
Car la fracture sociale est une réalité dans notre département. Ainsi, si on compare le revenu annuel médian par unité de consommation, donc par famille, on obtient  (chiffres de 2004) :
∑ 11 058 € à Gennevilliers ; 12 953 € à Villeneuve-la-Garenne ; 13 536 € à Clichy
∑ Mais 36 924 € à Neuilly ; 31 709 € à Saint-Cloud ;
Voici, clairement exprimées, les inégalités telles qu’elles existent dans le département des Hauts-de-Seine, et que le budget du Conseil Général pourrait corriger en partie.
Pour notre part, nous avons, comme chaque année, des propositions de priorités à développer :
I ) Tout d’abord, une priorité absolue au logement et à la qualité de l’habitat.
Cela passe bien sûr par une hausse substantielle du budget, mais pas seulement : il faut donner surtout donner un tout autre contenu, réorienter la politique à conduire pour améliorer le droit au logement pour tous dans les Hauts-de-Seine, en particulier les jeunes et les familles les plus fragiles. Nous ne cessons de le dire, c’est un devoir pour nous, conseillers généraux, de doter les politiques de l’habitat des moyens nécessaires, mais aussi d’obliger les acteurs du logement dans le département, et en premier lieu tous les maires, de construire des logements accessibles à tous, partout.
Je vais encore rappeler quelques chiffres édifiants : les Hauts-de-Seine, ce sont environ 80 000 demandeurs de logements, un chiffre qui ne cesse de croître depuis des années !
C’est un objectif de réalisation de 3 300 logements sociaux par an – un objectif bien modeste pourtant, que la majorité départementale s’est elle-même fixée, mais qui reste visiblement impossible à atteindre !
Ce sont des villes qui ne construisent que des logements PLS, inaccessibles à la grande majorité des familles populaires des Hauts-de-Seine. Ce sont 22 des 36 communes des Hauts-de-Seine qui n’ont sollicité aucun crédit PLUS ou PLAI en 2006, ce sont ces communes qui ne respectent pas la Loi sur les 20 % de logements sociaux.
Il faut absolument que le département soit moteur d’une toute autre politique de l’Habitat dans les Hauts-de-Seine, qu’il utilise pour cela tous les outils dont il s’est doté : les dispositifs d’aide à la pierre, mais aussi l’agence foncière, puisque vous l’avez voulu départementale, qui doit être utilisée pour développer des programmes véritablement sociaux, locatifs ou en accession, et ne doit en aucune façon être consacrée à la promotion immobilière.
Le fonctionnement de cette toute nouvelle agence foncière doit constituer un outil pour réduire les inégalités, et non pour les creuser davantage. Nous resterons vigilants sur ce point. &nbsp
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L’autre outil que nous réclamons, et qui demande une vraie détermination politique, c’est de développer des politiques différenciées en direction des communes qui ne jouent pas le jeu de la construction de logements sociaux et de la diversification de l’Habitat. Cela peut aller, pourquoi pas, jusqu’à supprimer des subventions ou des aides au développement de ces villes qui font le choix de rester en dehors d’un aménagement solidaire de notre département.
II ) Notre deuxième priorité, c’est de développer un programme exceptionnel de construction de collèges :
La réussite éducative des populations des Hauts-de-Seine fait également partie des priorités si nous voulons offrir une égalité des droits pour l’ensemble de nos citoyens.
Cela fait déjà plusieurs années que nous proposons au conseil général de s’engager sur un projet qui correspond à un vrai besoin, et qui aurait le mérite d’une grande visibilité, en prévoyant de façon systématique 1 collège pour 600 élèves maximum, et 1 collège pour 500 dans les zones méritant une attention particulière.
Nous en avons les moyens. Cela permettrait notamment la construction d’un 4ème collège à Gennevilliers, là aussi une ancienne revendication de notre groupe.
Mais la qualité de la politique éducative ne concerne évidemment pas que les bâtiments : certaines de nos revendications ne sont aujourd’hui toujours pas prises en compte, alors que leur utilité sociale est établie : c’est le cas de notre demande de ré-instaurer un système de bourses pour les lycéens, et de créer une bourse pour les collégiens, et permettre aux enfants des familles en difficultés de suivre une scolarité normale.
Dans le même ordre d’esprit, et toujours pour une action en direction des jeunes, nous demandons le rétablissement du dispositif Sac Ados, et une participation plus importante à la carte Imagin’R
Autre dysfonctionnement que nous continuons à condamner, c’est la poursuite de l‘aide disproportionnée du conseil général au pôle Léonard de Vinci ; on nous avait promis une rupture il y a trois ans dans notre politique à l’égard du pôle, nous constatons aujourd’hui qu’il n’en a rien été… La subvention dédiée au pôle est toujours supérieure aux subventions versée aux collèges publics des Hauts-de-Seine (17,22 M€ au pôle contre 15,69 M€ de crédits ordinaires aux collèges)
C’est là une comparaison qui n’est pas flatteuse pour notre département.
Je ne terminerai pas ce chapitre sur l’enseignement sans dire un mot rapide sur l’inquiétude réelle de la communauté éducative et des parents d’élèves, en particulier ici, à Nanterre, quant à la suppression des dotations horaires dans les collèges et les SEGPA.
Des initiatives existent un peu partout, à Nanterre c’est une opération « ville morte », nous sommes bien sûr déterminés à combattre ce qui représente un retour en arrière très préoccupant pour l’avenir des jeunes.
III ) Troisième point, un effort sensible en faveur des politiques de solidarité
De la même façon que nous proposons de travailler de façon plus nette en faveur des collèges, nous pourrions engager, en lien avec les communes, un programme d’investissement ambitieux en matière d’accueil des jeunes enfants.
Lancer une année crèche, en quelque sorte
Nous savons tous à quel point les besoins sont énormes dans notre département, et ce ne sont pas les allocations votées il y a deux ans (à l’initiatives du groupe communiste, je le rappelle) qui peuvent à elles seules compenser le manque d’équipements.
Autres points qui auraient pu faire l’objet d’actions significatives : la jeunesse, les personnes en difficulté.
Ce sont deux secteurs où, de façon très étonnante, les niveaux de financement stagnent, d’après votre rapport : à croire que dans ces deux domaines, les actions menées sont suffisantes et satisfaisantes, or c’est loin d’être le cas.
J’ai regardé d’un peu plus près les chiffres, or, pour les personnes ne difficulté, les montants alloués sont en baisse depuis 2005 : 145 M €uros il y a deux ans, 138 M €uros aujourd’hui pour l’ensemble des dispositifs d’aide aux bénéficiaires du RMI et le retour à l’emploi. Voilà un autre chiffre peu flatteur pour la politique sociale des Hauts-de-Seine.
Puisque nous parlons des actions en matière sociale, je vous invite à regarder d’un peu plus près ce qui se passe dans les entreprises d’insertion de notre département, et même au-delà beaucoup d’entre elles, et je pense en particulier à l’association ESSOR, qui gère notamment le restaurant d’insertion de l’AGORA à Nanterre, mais aussi bien d’autres entreprises sur ce même modèle, sont en train de souffrir énormément des baisses très nettes de subvention à la fois départementales et européennes. Ces structures sont aujourd’hui menacées de fermeture, faute de financements suffisants, il faudrait que le département les recense et prenne des mesures particulières en leur direction.
1,7 Million d’€uros pour le soutien aux projets locaux d’insertion, voilà un montant bien faible pour un domaine qui, je le rappelle, relève bien de la compétence du Conseil Général.
Autre domaine où le conseil général se doit de déployer des moyens financiers importants, la prévention de la délinquance, où la participation du département doit être accrue et plus accessible, pour tout ce qui concerne les clubs de prévention, les centres sociaux,…
IV) Quatrième priorité à notre sens, c’est l’emploi, la formation et l’économie
Nous regrettons en effet que le poste budgétaire principal soit consacré aux pôles de compétitivité, où des fonds publics gigantesques sont consacrés à aider des entreprises, sans contrôle de leur utilisation ni de leur utilité sociale. Cela n’est pas normal, lorsque l’on connaît la rigueur excessive des contrôles réalisés sur les bénéficiaires de prestations sociales dans notre pays. Nous préfèrerions par exemple que le conseil général se positionne plus fortement sur certains domaines, comme par exemple la formation professionnelle des jeunes dans notre département, même si cela ne dépend pas directement de lui …
V) Un effort à produire également dans le domaine de la voirie
Nous voulons aborder ce sujet car beaucoup d’actions restent à faire, pour améliorer notre réseau, sa sécurité, la résorption des points noirs.
C’est d’autant plus un suj
et de préoccupation que nous aurons dorénavant 40 kilomètres de voirie supplémentaires à gérer avec la remise par l’Etat de certaines routes nationales. La décentralisation ne doit pas nuire à l’entretien de notre réseau routier, ni retarder l’engagement des opérations prévues.
Voilà en quelques chapitres, les sujets les plus marquants que nous souhaitions développer en guise d’introduction de cette séance budgétaire. Bien sûr, je laisserai le soin à mes collègues, d’apporter toutes les précisions nécessaires dans le courant de la journée.
En attendant, et pour rester dans les grandes généralités, je voudrais vraiment revenir sur un autres aspect de l’actualité, à savoir ce qui se joue en matière d’aménagement du territoire francilien, à travers l’adoption du SDRIF, la signature des contrats de projet,….
Je voudrais lier cet aspect avec la modification des critères de subvention d’investissement pour lesquels nous venons, et je m’en félicite, d’entamer un travail de remise à plat.
Le conseil général se doit d’apporter des aides sans doute plus conséquentes aux communes qui ont fait des choix courageux en termes d’accueil des catégories sociales les plus fragiles de notre département. Les ressources des familles doivent entrer dans les critères d’attribution des aides du département.
Les Hauts-de-Seine doivent demeurer, peut-être même devrais-je dire « redevenir », un département ouvert à tous et à toutes les catégories sociales, un département varié et mixte.
Nous avons la conviction que le Conseil Général des Hauts-de-Seine se doit de jouer un rôle porteur dans ce domaine, il doit faire valoir le respect d’une vraie solidarité à l’échelon de la région toute entière, et non privilégier l’entre–soi qui a terme pénalisera l’ensemble de la métropole parisienne.
La mise en place de l’établissement public foncier départemental, le plan de relance de la Défense, pour ne citer que ces deux exemples qui vont se concrétiser dans l’année en cours, sont deux sujets qui ne nous semblent pas aller dans le bon sens, dans le sens d’une région plus unie.
Partout, nous parlons développement durable et soutenable pour tous, meilleure justice sociale, avenir de la métropole parisienne. Or notre région ne sera véritablement viable que dans la mesure où elle saura développer un modèle davantage basé sur la solidarité et la complémentarité, dans des territoires où serait privilégiée la cohésion sociale, et non l’esprit de compétition forcené et la tentation du repli identitaire. Ce budget, j’ai le regret de le dire, ne prend pas ce chemin.
Le groupe communiste ne le votera donc pas.

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