8-10-2004.Coopérations internationales

Séance du CG du 8 octobre 2004. Intervention Patrice Leclerc sur la politique internationale.

Le groupe communiste se félicite de la tenue du débat de notre assemblée sur la politique internationale du Conseil Général. Nous l’avions demandé, il y a plusieurs mois. Cela arrive aujourd’hui, c’est une bonne chose.

Une remarque cependant, il serait bon que ce type de débat soit précédé par des auditions et consultations de citoyens, d’associations en amont de notre séance publique. Il y aurait là un petit pas de votre part, vers une forme de démocratie participative réelle et permanente, qui ne se confond pas à de la communication.

La politique internationale de notre département, comme celle en direction de l’université, (je pense au pôle léonard de Vinci), porte la marque très forte de votre prédécesseur. Allez-vous la poursuivre ou rompre avec cette marque ?

Je rappelle que le 8 février 1991, lorsque le Conseil général a pris formellement la décision de mettre en œuvre une politique de coopération avec notamment la création d’une filiale de SEM 92, qui deviendra la SEM Coopération, le groupe communiste a voté contre.

Cohérents avec cette décision nous n’avons donc jamais fait partie du Conseil d’administration de la SEM coopération. Nous n’avons pas souhaité nous impliquer dans une initiative qui manquait de visibilité, de clarté sur les objectifs et les moyens pour y parvenir.

Pour illustrer les raisons de « notre méfiance » permettez-moi de citer une intervention que j’ai faite le 25 octobre 2002 sur le rapport 296, je cite :

« Le groupe communiste ne peut pas approuver ce rapport. En effet, on ne fait pas mieux dans le flou.

Il n’y a que l’enveloppe budgétaire qui est précise et concrète: 100.000 euros !

Vous demandez aux élus de notre assemblée de signer un chèque en blanc tout simplement.

La lecture du résumé de l’action était éloquente : "il est donc proposé d’étendre le champ d’intervention de COOPERATION 92, vu ses compétences dans le domaine de la coopération, en lui confiant la mission de suivi des interventions notamment culturelles vers l’Asie, ainsi que le développement de nouveaux accords de coopération en Asie".

Pourquoi cette extension du champ de coopération, sur quelles pistes? A quelles fins? Il y a quoi en plus du "notamment culturelles"? » Demandais-je alors sans obtenir de réponses.

Notre débat de ce jour, nous permettra certainement d’y voir plus clair. Comprenez bien que nous ne contestons pas le fait que notre collectivité agisse dans le champ de la coopération internationale, voire y investisse beaucoup d’argent. Avec des inscriptions budgétaires annuelles de 4,5 millions d’euros, notre département investi certainement un des montant les plus élevé en France consacré à la coopération décentralisée.

Il y a des actions intéressantes, utiles, nous ne le contestons pas. Si nous ne pensons pas que ce montant est excessif, nous sommes sur qu’il devrait être mieux utilisé, que les objectifs et les moyens des actions de coopération devraient être renouvelés, repensés.

Depuis 1991, les opérations de coopérations sont gérées par une Société d’économie Mixte car le Président Pasqua expliquait en plus de l’argument « de la souplesse et de la rapidité d’intervention » qu’il attendait des « fonds d’un certain nombre d’entreprises, notamment les plus importantes, et qui n’attendront aucun bénéfice en retour ».

Au fil des rapports présentés nous avons pu noter que des entreprises tels que Bouygues ou Thomson sont ou ont été actionnaires de la SEM. Je note d’ailleurs que le rapport ne fait jamais allusion aux entreprises partenaires.

Il est impossible de penser qu’elles n’y trouvent pas d’intérêt. Ce n’est pas une critique, mais dans la nature même des intérêts privés.

On le voit sur le cas de l’université léonard de Vinci qui devait avoir un partenariat public/privé dans son financement : on attend toujours la contribution financière des entreprises. Pour être crédible et efficace la coopération doit être financièrement désintéressée.

Par ailleurs, la gestion par la SEM de ce type d’action coûte cher. Celle-ci se posant en société intermédiaire perçoit des commissions non négligeables sur les activités de coopération. Un exemple parmi d’autres : pour une opération d’hydraulique au Burkina Faso, en 1992, d’un montant estimé à 1 433 150€, la SEM a perçu une rémunération de 236 300€, soit plus d’1,5 millions de francs !

Notre critique de l’activité internationale rejoint la critique que nous faisons sur d’autres secteurs d’intervention de notre département, comme la culture par exemple. Nous ne percevons pas d’ambition, de cohérence, de ligne directrice.

Le Conseil général fait trop souvent office de guichet, sans que l’on comprenne bien les critères de choix des aides. Sans que l’on appréhende bien l’impact sur place : Si la SEM coopération assure la maîtrise d’ouvrage des opérations, qui fait les travaux ? Qui désigne les entreprises ? Dans quelle mesure nos actions permettent que la coopération ne soit pas « une rente », une fin en soi, mais un moyen pour que les habitants du pays concerné deviennent les acteurs de leur propre développement comme vous semblez en affirmer la volonté dans le rapport ?

Dans quelle mesure les entreprises locales sont-elles associées ?

Mais aussi dans quelle mesure les populations alto séquanaises sont-elles associées, de façon bien plus importante que les deux ou trois exemples contenus dans le rapport ?

La faiblesse de votre action en ce domaine constitue un handicap pour une bonne appréhension et appropriation de la politique de leur département par les habitants des Hauts-de-Seine.

On peut estimer à environ 300 millions de francs les sommes consacrées au développement et à la coopération durant toutes ces années ?

La portée de ces opérations dans la population des Hauts-de-Seine est pourtant proche de zéro !

Pourtant, tous les acteurs de la coopération décentralisée sont unanimes sur ce point : c’est un véritable échange qui doit être initié, et non pas une quelconque aide unidirectionnelle, depuis le riche nord vers le sud déshérité.

Les populations de notre département ont aussi beaucoup à apprendre, les enrichissements doivent être mutuels.

Des demandes nouvelles se font jour chez nos concitoyens, notamment en faveur d’échanges solidaires, de commerce équitable, de tourisme solidaire, de parrainage, sans parler de projets pédagogiques pouvant provenir des collèges et lycées. Il y a là de nouveaux domaines d’actions à explorer, à développer.

Le groupe communiste ne se contente donc pas de porter des critiques sur votre gestion, nous faisons des propositions et nous sommes prêts à nous investir dans un travail au sein de notre assemblée pour faire avancer ce dossier sur quatre axes :

  • Associer clairement les habitants des Hauts-de-Seine, associations, élus, acteurs locaux à la définition des besoins et aux actions de coopé
    ration. Nous pourrions avoir un effort particulier en direction de la jeunesse de notre département souvent très sensible et intéressé aux actions de solidarité internationale. Des structures de portage plus conviviales, de type association, seraient sans doute à privilégier. Nous serions ainsi en phase avec la charte de la coopération décentralisée pour le développement durable rédigée en avril 2004 qui sous le paragraphe intitulé « réciprocité », stipule : « La coopération décentralisée repose sur une logique de partage et va bien au-delà de la traditionnelle aide humanitaire ou mise à disposition de fonds. La valorisation des acteurs, de leurs savoirs et de leurs savoir-faire, fonde ce principe, soutenu par la conviction que le partenariat doit être mutuellement équitable et que les particularités de chaque partenaire sont une source d’enrichissement pour l’un et pour l’autre ».
  • Lancer une réflexion sur les opérations à financer : il faut des exigences démocratiques clairement exprimées, mettant enjeu la participation des habitants concernés à la définition des programmes. Cela conduira sans doute à allonger les délais de préparation puis de réalisation, mais c’est nécessaire à l’utilité sociale pour les populations concernées, les investissements réalisés. Là encore nous serions en phase avec les principes de l’agenda 21 et la charte déjà cité demandant que « les autorités locales jouent un rôle éminent pour la mise en œuvre du développement durable. (…) la coopération s’attachera, dans le respect des dispositions des Etats concernés, à accompagner l’émergence de pouvoirs locaux autonomes et démocratiques mais aussi de système de gouvernance locale participative ».
  • Une réflexion pourrait être menée sur le financement et la construction des opérations. N’avons-nous pas à rechercher des co-élaborations avec les villes du département, la région, chercher des partenariats avec des associations pour favoriser la recherche d’une concertation, d’une complémentarité, d’une mise en cohérence des initiatives menées par l’ensemble des acteurs de différents niveaux.

Peut-être pourrions nous nous inspirer dans le domaine du développement de ce que vous faites dans le domaine de l’action économique internationale ? Le Comité départemental de l’exportation des Hauts-de-Seine est composé de la CCIP, de la Chambre des métiers, des conseillers du commerce extérieur du 92, du Medef du 92, et du conseil général. Là, il semble bien y avoir une structure participative avec le patronat. Pourquoi ne pas faire la même chose avec les associations de solidarité du département, des représentants des collectivités, des citoyens pour travailler les propositions de coopérations décentralisées, les aides au développement ?

  • Supprimer toute implication du secteur marchand dans le processus de coopération, et amorcer une réflexion conduisant à terme à la dissolution de la SEM qui fait figure d’écran à la politique départementale pour intégrer « ses fonctions » dans l’organigramme de l’administration du Conseil général.

Voilà, Monsieur le Président, Chers collègues, les quelques propositions que j’étais chargé de présenter au nom du groupe communiste.

Je profite d’avoir la parole pour vous rappeler Monsieur le Président, que mes collègues Michèle Fritsch et Nadine Garcia vous ont écrit le 3 septembre dernier pour que vous interveniez comme Ministre et comme Président du Conseil général dans le dossier de l’entreprise TIMING située à Montrouge et qui veut se délocaliser. Pourtant cette entreprise a bénéficié d’un crédit d’impôt de 3,8 milliards d’euros en contre partie de « la sauvegarde de l’emploi ». Avec les salariés, nous attendons toujours votre réponse.

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