Conseil municipal du 27 septembre 2023
Compte tenu de la déclaration de Mr Macron Dimanche sur le retrait des troupes au Niger et du retour de notre ambassadeur, ce vœu écrit il y a 10 jours n’a pas lieu d’être en l’état, mais il me semble important d’en faire une lecture modifié et d’en faire un vœu formateur.
Car pour comprendre ce qui se passe aujourd’hui dans une partie du Sahel, il faut comprendre l’histoire.
Savoir rapidement que l’Afrique, ce grand continent, est un conglomérat d’ethnies et de langues que l’Europe impériale du XIXe siècle a fermé dans le cadre de frontières artificielles sans presque jamais tenir compte des raisons naturelles, qu’elles soient ethniques, linguistiques ou simplement économiques. Cela a commencé en 1884 durant la conférence de Berlin.
Cela a causé des dégâts irréparables. Certains pays en souffrent encore aujourd’hui » :
87% de la longueur de ces frontières, soit 70 000 km sur un total d’environ 80 000 km, sont directement hérités des partages coloniaux.
La France créa alors l’Afrique Occidentale Française (AOF) voulant fédérer entre 1895 et 1958 ses huit colonies d’Afrique de l’Ouest, avec l’objectif de coordonner, sous une même autorité, la colonisation française sur le continent africain, L’AOF allait ainsi orienter l’évolution économique, politique, religieuse et sociale des territoires concernés.
L’organisation et le fonctionnement de l’AOF a permis à la France d’essorer l’exploitation économique par la mise en valeur du territoire. Ainsi l’économie coloniale s’articule autour de la fiscalité, de l’exploitation et du pillage, de la monnaie et du système bancaire, de l’industrie et du commerce.
Les pays d’Afrique de l’Ouest ont obtenu leur indépendance vers 1960.
Arrivera ensuite la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest le 28 mai 1975. La CEDEAO qui a été créée pour favoriser la coopération et l’intégration, ce qui a entraîné la création d’une Union économique et monétaire en Afrique de l’Ouest. Mais dépendante des relations France Afrique. Ce terme qui désigne l’ensemble des relations entre la France et ses anciennes colonies africaines pour en dénoncer le caractère ambigu et opaque. La France est le seul pays au monde qui se paie encore le luxe de gérer la monnaie de ses ex-colonies, et ce, plus d’un demi-siècle après leur indépendance.
Aujourd’hui les États d’Afrique francophone se sentent prisonniers d’un pré carré qui n’existe plus depuis longtemps. Si Paris fait aujourd’hui figure d’épouvantail, c’est dû au poids de cette histoire. Politiquement, culturellement et économiquement, la France s’est éloignée.
L’Afrique continent ami, ne semble plus comprendre la France, et conteste de plus en plus son rôle et sa présence. Est né un sentiment de dépossession.
L’Afrique subit toujours les effets délétères d’un « colonialisme économique déchainé ». Sont incriminés pêle-mêle les drastiques ajustements structurels du FMI, de la Banque mondiale et autre OMC, les pressions de la Chine, de la Russie, de l’Europe, le pillage des ressources, le soutien à des dictateurs, l’ingérence dans les affaires intérieures. Bref, l’Afrique cherche à conquérir une légitime souveraineté pour agir face aux enjeux économiques, sociaux, climatiques et stratégiques qui agitent la planète.
Revenons aux évènements actuels ; le 26 juillet un coup d’état a eu lieu au Niger. La France laisse à la CEDEAO le soin de gérer la crise en première ligne, elle n’est pas résignée à subir le coup d’État à Niamey comme elle a subi ceux à Bamako, au Mali, en 2020 et à Ouagadougou, au Burkina Faso en 2022. Elle veille à modérer ses commentaires pour ne pas être accusée d’ingérence. Mais elle compte bien défendre ses intérêts et cherche à mettre un coup d’arrêt à ce qu’elle considère comme le coup d’État de trop. Elle cherche à crédibiliser toutes les options, y compris celle d’une opération militaire. Dans ce bras de fer, la France se montre intransigeante et considère impossible de négocier avec les putschistes.
L’organisation ouest-africaine a plusieurs fois brandi la menace d’une intervention armée et a imposé de lourdes sanctions économiques au Niger. Or, le Burkina Faso et le Mali voisins estiment qu’une opération militaire contre leur pays serait une « agression illégale et insensée » et ont promis une « riposte immédiate » à toute agression
Le 17 septembre 2023 les régimes militaires au Mali, au Burkina Faso et au Niger, ont signé une charte établissant une alliance défensive. La charte du Liptako-Gourma en référence à la région du Liptako-Gourma, frontalière du Mali, du Burkina Faso et du Niger, ravagée par le djihadisme au cours des dernières années. Son but est d’établir une architecture de défense collective et d’assistance mutuelle.
Cette nouvelle Alliance, G3, des États du Sahel semble ainsi marquer un point final à la coopération militaire de ces trois pays avec leurs anciens alliés occidentaux, auparavant réunis dans l’organisation militaire du G5 Sahel depuis 2014 pour lutter contre le djihadisme. Après le départ des troupes du Mali en 2022 puis du Burkina Faso en février 2023, le nouveau gouvernement de Niamey a indiqué à son tour début septembre que des négociations sont en cours pour un retrait rapide des quelque 1500 militaires français présents dans le pays. Mais la France s’y opposait jusque là.
Les mouvements migratoires importants connus ces derniers jours à Lampedousa ne peuvent être dissociés de ces menaces de conflits armés dans toute l’Afrique de l’Ouest.
Aussi, le conseil municipal de Gennevilliers demande à la France de :
- Permettre à la CEDEAO de gérer la situation par des voies diplomatiques,
- Abandonner toute éventualité d’une intervention armée.
- Mettre un terme à son ingérence au Niger, au Mali et au Burkina
Ces propositions visent à restaurer la souveraineté africaine et à offrir au continent les moyens de choisir sa propre voie de développement. Ce n’est qu’ainsi que l’Afrique pourra maîtriser pleinement son destin.