PROJET DE LOI N°4337 MODIFIANT L’ARTICLE 136 DU TRAITE SUR LE FONCTIONNEMENT DE L’UNION EUROPEENNE
PROJET DE LOI N°4336 AUTORISANT LA RATIFICATION DU TRAITE INSTITUANT LE MECANISME EUROPEEN DE STABILITE
Explication de vote de Roland MUZEAU, Porte parole Député-e-s Front de Gauche
« Nous voterons contre le projet de loi vous autorisant à ratifier le mécanisme européen de stabilité.
Si ce texte visait à mettre en place un fonds d’assistance aux Etats en difficulté au nom d’une véritable solidarité européenne, nous aurions pu y être favorables, mais le mécanisme que vous nous proposez n’est pas un simple organe de « coopération intergouvernementale », c’est une machine de guerre contre les peuples.
Ce mécanisme a en effet pour objectif premier d’instaurer des normes renforcées de discipline budgétaire. Il ne s’agit pas de fournir une aide aux Etats qui en ont besoin mais de préserver les intérêts financiers des banques et des créanciers, de mettre en place des plans d’assistance au système bancaire en sacrifiant les populations sur l’autel du profit.
Nous en avons l’exemple dramatique en Grèce.
Vous vous félicitez du nouveau plan de sauvetage intervenu la nuit dernière alors que ce plan ne règle rien et n’ouvre aucune perspective nouvelle pour l’avenir du pays. Vous vous félicitez que le gouvernement grec ait accepté les contreparties fixées par la BCE, la Commission et le FMI. Ces contreparties sont pourtant scandaleuses. Le plan adopté par le gouvernement grec, samedi dernier, va se traduire par de nouvelles coupes dans les pensions, une nouvelle baisse de 22% du salaire minimum à 580 euros mensuels et moins encore pour les jeunes, le blocage total des salaires pour une durée indéterminée et à la suppression de milliers d’emplois publics et privés. En échange d’aides qui bénéficient exclusivement au secteur bancaire, le peuple grec va devoir faire face à des programmes d’austérité implacables aux effets dramatiques et qui annihilent toute perspective de croissance.
Avec le mécanisme européen de stabilité, vous ne proposez rien d’autre que ce que nous voyons aujourd’hui à l’œuvre en Grèce.
Ce mécanisme sera soumis au contrôle technocratique d’un collège de gouverneurs et imposera aussi, vous le savez, le secret sur les mécanismes de décision. Aucun compte ne pourra être demandé par le gouvernement ou le Parlement. Quel parlementaire est prêt à ce renoncement ?
Ce mécanisme européen est en outre intimement lié à l’adoption programmée du futur traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance dans l’Union européenne. Traité qui doit être approuvé par le Conseil européen, la semaine prochaine. Au terme de ce texte, un Etat ne pourra en effet recevoir d’aide au titre du MES sans avoir préalablement ratifié le traité Sarkozy Merkel.
Or que prévoit ce texte ? La systématisation des contrôles budgétaires exercés sur les Etats, au mépris de leur souveraineté budgétaire, la sanction des Etats qui ne se conformeront pas à la règle d’or et au diktat des marchés, via la saisine de la Cour de Justice.
Ce texte franchit un pas de plus dans l’inacceptable, dans le dessaisissement démocratique des citoyens et des peuples, en violation manifeste et délibérée des principes de souveraineté budgétaire et de séparation des pouvoirs. Nous considérons qu’il est inconstitutionnel et saisirons le Conseil constitutionnel.
Il demande aux parlementaires d’abdiquer leur rôle d’élus du peuple pour confier les clefs de la politique économique à Bruxelles qui veut imposer partout en Europe, sous la pression des marchés, le règne de l’austérité.
Nous ne pouvons accepter cette mise sous tutelle, cette abdication, et de voir ainsi piétinés les principes démocratiques les plus élémentaires.
Avec ces traités, vous voulez asphyxier l’Europe. Nous voulons au contraire lui redonner du souffle.
Les peuples européens ne veulent pas de la purge sociale que vous tentez de leur imposer ni sacrifier leur avenir pour le seul bénéfice des détenteurs de capitaux. Aucune fatalité ne pèse sur l’austérité. L’Europe des peuples n’a pas besoin d’un pacte de stabilité mais d’un pacte de solidarité et de croissance fondé sur la relance de la consommation intérieure, l’investissement, le soutien aux filières industrielles, des protections ciblées pour contrecarrer les délocalisations et le dumping social.
Cela ne peut se faire sans reconsidérer l’architecture des institutions européennes et reconsidérer le rôle de la BCE, dont l’indépendance et la politique monétariste ont eu et continuent d’avoir des conséquences ruineuses sur la croissance du continent.
En voulant imposer aujourd’hui le mécanisme européen de stabilité, vous bafouez une fois de plus le « non » des français au traité constitutionnel de 2005. Nous refusons ce nouveau coup de force comme nous nous opposons aux logiques qui sont en train de broyer le peuple grec et qui broieront demain peut-être l’ensemble des européens.
Les députés du Front de gauche, communistes, républicains, citoyens, Parti de Gauche lancent un appel à tous les parlementaires et particulièrement à ceux de gauche.
N’acceptez pas ce coup de force contre notre démocratie. Un seul vote s’impose pour rendre possible, demain, une autre politique et rendre crédible l’idée même d’une renégociation européenne : c’est le rejet de ce traité. »