Article paru dans 20 minutes du 23/11/2011
GENNEVILLIERS (Hauts-de-Seine) – Une porte toujours ouverte, un suivi psychologique et social, des hébergements: l’association L’Escale accueille à Gennevilliers (Hauts-de-Seine) des femmes victimes de violence, parfois « en danger de mort », et les aide à « reconstruire leur vie ».
« Les femmes ont souvent l’adresse par des assistantes sociales ou des hôpitaux », explique Françoise Brié, directrice de l’association, membre de Solidarité Femmes (FNSF), à deux jours de la journée internationale contre les violences faites aux femmes.
Neuf femmes reçues sur dix sont victimes de violences conjugales. Les autres ont subi des violences sexuelles ou au sein de leur famille.
Objectif de L’Escale: « Soustraire ces femmes à la violence, les accompagner dans diverses démarches (dépôt de plainte, ouverture d’un compte…), dans la recherche d’un emploi, d’un logement, leur permettre de rencontrer d’autres femmes vivant les mêmes situations, mais aussi développer l’information ou la formation », explique Mme Brié.
Les 22 salariés -écoutantes, psychologues, assistantes sociales…- répondent aux appels et suivent environ 350 femmes.
« Notre premier souci est de mettre à l’abri des femmes qui nous semblent en danger de mort », racontent Sylvie et Samira, responsables du « service d’urgence ». « Parfois, elles n’ont pas elles-mêmes conscience du danger ».
L’association dispose, dans le département, de centres d’hébergement d’urgence et de réinsertion sociale.
Ainsi, « une jeune Marocaine, séquestrée par son mari pendant trois ans, a profité d’une occasion pour s’échapper et frapper à notre porte », racontent Sylvie et Samira.
« Mais parfois, les femmes n’ont pas l’énergie de fuir, comme cette mère de trois enfants, dont le mari lui avait pourtant cassé les doigts ».
Certaines décident de quitter le foyer conjugal dès les premières violences. A d’autres, il faudra des années pour faire ce choix, et la reconstruction sera alors plus difficile.
« Beaucoup décident de partir quand leurs enfants ont grandi et qu’elles pensent qu’ils ont désormais conscience de ce qui se passe », souligne Samira.
En deux ans, 663.000 femmes ont été victimes de violences physiques ou sexuelles au sein du foyer, selon une étude de l’Observatoire national de la délinquance et des réponses pénales.
« Les violences conjugales sont toujours basées sur un rapport de domination », explique Françoise Brié. « Au début, la violence est souvent verbale ou psychologique, avec des phases de rémission pendant lesquelles l’auteur va s’excuser. Très vite, le cycle s’aggrave et la violence devient physique, mais aussi économique, puisque les femmes sont dans de nombreux cas privées d’autonomie financière. Les violences sexuelles sont fréquentes et rarement dénoncées », poursuit-elle.
Hanane fait encore des cauchemars, dans lesquels elle voit son mari, de 23 ans son aîné, la menacer avec un couteau. Quand il l’a fait venir en France, en août 2010, il lui avait pourtant promis « le paradis ».
« Je l’aimais mais je ne le connaissais pas bien quand on s’est marié », raconte cette Marocaine de 30 ans.
« Quand je suis arrivée en France, j’ai réalisé qu’il m’avait menti sur tout ».
Très vite, les coups pleuvent: claques, coups de pied et même coups de couteau. « Il me traitait de prostituée parce que j’étais maquillée, criait parce que le ménage n’était pas assez bien fait à son goût », raconte Hanane.
C’est lors d’un séjour à l’hôpital qu’elle entend parler de L’Escale. « J’ai pleuré en arrivant mais on m’a dit que j’avais beaucoup de courage », se souvient-elle. Grâce à l’association, elle a appris le français, cherché un travail et « compris que les femmes avaient des droits ».