Contribution pour la conférence nationale du PCF

Patrice Leclerc
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Patrice Leclerc – Section de Gennevilliers

L’actuelle stratégie du PCF date de deux congrès qui sous le slogan « PCF is back », annonçait un progrès du PCF aux élections, puisque nous allions présenter un candidat à chaque élection, un progrès en nombre d’adhérents parce que le PCF serait plus visible, un progrès en implantation de cellule à l’entreprise et autres parce que nous serons plus déterminés à le faire.

Objectivement, l’orientation politique majoritaire au congrès de 2018 et le suivant est un échec sur les trois plans:

  • échec électoral,
  • moins d’adhérent-es,
  • pas d’implantations nouvelles significatives.

Triple échec alors que nos passages médiatiques sont plus importants (mais pour dire quoi?), nos petites phrases, nos « punchlines » plaisent (mais à qui?), notre secrétaire national et candidat est connu et apprécié (mais de qui?).

Notre problème n’est pas une question de personne mais d’orientation politique, de stratégie politique et de contenu politique.

Le résultat pour le PCF est mauvais: pour la deuxième fois à des élections européenne, nous n’avons pas d’élu à l’Europe, alors qu’avec une liste d’union nous aurions pu en avoir au moins un. La stratégie que c’est en se présentant à toutes les élections que l’on progressera ne marche pas. Pire, nous avons créé un rapport de force défavorable avec des pertes de voix dans toutes les villes communistes, quelle que soit l’attitude du maire. Soutien ou pas soutien, campagne ou pas campagne: le PCF s’effondre. Il fait même moins à Vitry 5,48%, Villejuif 5,31%, Montreuil 3,61% qu’à Gennevilliers avec 6,17%, pourtant les maires sont dans la ligne !

Cette ligne est suicidaire, car elle montre que dans nos villes, soit la FI soit le RN sont devant nous. Elle est irresponsable devant la montée de l’extrême droite, une liste d’union aux européennes aurait pu créer un rapport de force différent pour aborder les législatives suivantes, une dynamique populaire plus importante que celle que nous avons vu avec le Nouveau Front Populaire. Cela aurait pu placer le PCF dans cette dynamique d’union et c’est dans les périodes d’union que nous nous renforçons.

Nous avons un problème de contenu politique.

Comment est-il possible que la FI capitalise sur la Palestine et pas le PCF qui historiquement se bat pour les droits du peuple palestinien? Ce n’est pas par manque d’alerte de communistes offusqués que le PCF emboite le pas au CRIF, à la droite et aux socio-libéraux sur le thème du terrorisme, de l’antisémitisme de la FI (BFM: Fabien Roussel « aimerait bien que Jean-Luc Mélenchon et d’autres de ses députés clarifient leurs positions ») . Fabien Roussel a même eu cette phrase insultante pour les quartiers de nos villes populaires: « Ça fait longtemps que le PS ne parle plus qu’aux bobos des villes et Mélenchon à la fraction radicalisée des quartiers ». Peut-être devons-nous mesurer la baisse de l’abstention aux européennes et législatives dans les quartiers populaires à l’aune de cette phrase: « fraction radicalisée des quartiers des quartiers périphériques » (JDD 6 mars 2022)?? Nous avons alerté contre le choix de la direction nationale de diviser le mouvement de solidarité avec la Palestine, de refuser de participer aux premières manifestations, de refuser de signer les appels du collectif national. C’est le choix de la politique nationale contre la FI qui a tué notre internationalisme et notre lien avec les quartiers populaires.

Je ne partage pas le caractère anti-démocratique de la FI, ni parfois son outrance pour marquer les esprits, mais cela ne doit pas nous empêcher de nous interroger sur comment est-il possible que la FI réussisse à faire sortir des abstentionnistes et pas nous ? C’est une question de contenu et de capacité à être en résonnance avec ce que pensent les gens, une capacité à donner le sentiment que le vote va être utile pour se faire respecter. C’est vrai sur les quartiers populaires, c’est vrai aussi dans les campagnes.

Pourquoi ne travaillons-nous pas à partir des expressions des gens, des catégories populaires qui ont manifesté avec les gilets jaunes, à travers leurs cahiers de doléances pour travailler un débouché politique émancipateur ? Au lieu de cela nous allons sur le terrain du RN: l’immigration (Roussel: sur l’immigration, il faut être plus ferme (RMC le 11/04), « sur la France du travail et la France des allocs (il y a là un marqueur des intentions de vote RN), sur Sandrine Rousseau et les « Fléministes » qui « sont pour la flemme », sur l’assassinat de Philippine ou l’on enfourche le thème de droite et RN sur les défaillance des OQTF (Deffontaines), loi immigration où Roussel appelle au dialogue et laisse la porte ouverte à une abstention (BFM 05/12/2023). Post de Deffontaines: « européennes 2024. Immigration, un seul mot d’ordre ‘l’intégration », sur la valeur travail, plutôt que sur la valeur du travail, …

La confusion politique ne marche pas quand on cède aux idées dominantes capitalistes: devant les entrepreneurs Fabien Roussel dit « qu’il défend le droit au bonheur de tous (…) pour les salariés, pour les chefs d’entreprise » ou dans un autre journal « Améliorer la compétitivité de nos entreprises, c’est notre projet aussi » voulant pour cela « baisser les charges qui pèsent sur nos entreprises » et proposer « des prêts bonifiés aux entreprises ».

 BFM, Léon Deffontaines « peu importe la couleur politique des ministres on devra avoir un gouvernement qui s’attelle à régler le pouvoir d’achat des français ». Roussel le 11/01/2024 sur France info: « Remaniement: « tout dépend du projet qui est mis sur la table », Fabien Roussel ne ferme pas la porte s’il est appelé au gouvernement ».

Roussel sur Cnew: « Je représente la gauche républicaine, universaliste et souverainiste » Et toute la campagne des élections européennes qui délaisse les travaux de la section éco sur le BCE, la coopération entre les peuples, mais insiste sur le souverainisme, les frontières, etc…

Nous payons le choix d’une stratégie mauvaise qui ne tenait pas compte de la réalité politique.

Nous payons le choix d’y aller seul (car qui a pu croire à la gauche unie?), nous payons le choix de contenu: sur la Palestine, sur l’union, sur le productivisme vert, sur les fâchés pas fachos.

Résultat de notre stratégie, le communisme municipal est bouffé par deux bouts: en province par le RN et en RP par la FI. Nous jouons « notre patrimoine municipal » partout en France concurrencé soit par le RN soit par la FI.

Voilà ce qui a été semé: notre affaiblissement. Car la direction, l’orientation du dernier congrès a conduit à la poursuite de l’affaiblissement du parti d’un point de vue électoral, d’un point de vue de notre nombre de cotisant (-7000), d’un point de vue de notre implantation, d’un point de vue idéologique en n’étant pas sur des contenus communistes transformateur et de rassemblement.

Que faire maintenant?

En interne se dire ce que nous avons à nous dire. La direction nationale devrait tirer les leçons de ses lourdes responsabilités. Peut-être faudra-t-il un congrès pour tirer le bilan de 6 ans d’une stratégie d’échecs?

En externe, travailler au rassemblement de toutes les forces de gauches et écologiques, créer les conditions du développement du Front Populaire, sur le terrain, en associant le mouvement social et civique dans une nouvelle dynamique unitaire. Une dynamique de rassemblement circonscription par circonscription, pour ancrer cette dynamique politique en bas et pas seulement avec des états-majors.

Revenir sur nos ambitions communistes: développer la conscience de classe, travailler à un communisme du XXIème siècle qui fait de la décroissance un outil de transformation des modes et rapports de production pour répondre aux enjeux de notre siècle, ne rien céder à notre internationalisme pour s’adresser à la jeunesse, combattre le racisme, l’antisémitisme, la haine de l’autres pour faire barrage aux RN et agir pour des « jours heureux » sur le terrain et maintenant plutôt que les thèmes du RN.

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