Claire Villiers, vice-présidente du conseil régional d’Île-de-France, est candidate sur la liste du Front de gauche. Elle revient sur son premier mandat et pose la question de la participation des salariés dans les collectivités.
Membre d’Alternative citoyenne, et ancienne syndicaliste à l’ANPE (CFDT puis SNU-FSU), Claire Villiers est également fondatrice d’Agir ensemble contre le chômage. Élue en 2004 sur la liste Gauche populaire et citoyenne, elle est en charge de la démocratie régionale. Elle est à nouveau candidate dans les Hauts-de-Seine.
Vous achevez votre premier mandat. Quel bilan tirez-vous de votre action pour la démocratie régionale ?
Claire Villiers. Nous avons créé les outils pour que les forces sociales aient davantage de moyens d’intervenir sur les politiques régionales. Pour cela, il ne suffit pas de créer quelques instances participatives. Ce n’est pas parce que la gauche est majoritaire dans une région que ce territoire est libéré de la mondialisation capitaliste et des appétits prédateurs du gouvernement. Mettre en place des politiques plus justes exige une véritable mobilisation citoyenne. Il s’agit de « participer » pour peser collectivement à partir des besoins des Franciliennes et des Franciliens. Nous avons ainsi contribué à renforcer le réseau associatif afin que celles et ceux qui sont dominés puissent construire leurs paroles, leurs convictions et leurs revendications.
Il s’agit de faire émerger une conscience collective. Cela a- t-il débouché sur des actions ?
Claire Villiers. Cette région abrite énormément d’énergies. Tous les jours, on nous montre que le monde va mal, que chacun est dans son coin et que nous n’y pouvons rien. Pour casser cette spirale de la fatalité, nous avons souhaité valoriser les secteurs collectifs. Ces associations ont construit un site collaboratif (1) qui donne des informations sur l’actualité des pratiques démocratiques. Dans le cadre de la lutte contre les discriminations, nous avons également mis sur pied une Semaine de l’égalité durant laquelle les décideurs sont interpellés. Nous avons aussi participé au financement du Forum social des quartiers populaires, soutenu les médias de proximité associatifs et coopératifs, l’éducation populaire et construit un centre de ressources pour l’égalité femmes-hommes.
Syndicaliste, vous liez souvent travail et démocratie. Comment rendre les travailleurs acteurs de leurs régions ?
Claire Villiers. Les compétences des collectivités territoriales s’arrêtent souvent à la porte du travail. Or il ne peut y avoir de démocratie si la vie n’est pas prise dans sa totalité. Le conseil régional n’est pas un simple guichet mais une collectivité politique qui doit pouvoir intervenir en matière de droits sur tous les lieux de vie. Nous avons donc ouvert un chantier, « Travail et démocratie », pour dire comme Jaurès : « Nous avons conquis le suffrage universel, il nous reste à conquérir la souveraineté populaire » et faire en sorte que cette dernière s’exerce dans tous les lieux. Ainsi, en matière d’aménagement du territoire, seuls les habitants ont leur mot à dire en tant qu’élus d’une ville. Pourquoi ne pas imaginer que, dans un conseil municipal, les salariés du territoire puissent être élus en tant que tel pour intervenir sur la finalité de ce qu’on produit ?
Comment appréhendez-vous cette campagne ?
Claire Villiers. Ces listes, qui portent une plus grande diversité qu’en 2004, ont été difficiles à construire si bien que certaines forces, telles que le NPA ou la Fédération pour une alternative sociale et écologique en Île-de-France, ont préféré se retirer. Je le regrette car, en Île-de-France, nous avons un affrontement majeur avec le gouvernement, dont Valérie Pécresse est la candidate. Choisira-t-on un projet inégalitaire, ségrégatif et antidémocratique ou un projet solidaire, citoyen et coopératif qui est celui que notre liste de rassemblement porte ? Nous pouvons faire les meilleures propositions en matière de logement ou de transport, il est nécessaire de s’opposer au pied de nez que le gouvernement prépare avec la Société du Grand Paris qui aura droit de préemption sur presque 50 % du territoire francilien. Il y a donc un enjeu démocratique et d’égalité considérable.
Entretien réalisé par Lina Sankari